Place des anticoagulants au cours de la cirrhose

Objectifs pédagogiques

  • Connaître les indications hépatologiques des anticoagulants au cours de la cirrhose et les conditions de leur arrêt
  • Connaître les risques hémorragiques des gestes réalisés sous anticoagulants chez le cirrhotique

Introduction

Un ensemble de données récentes a amené à modifier notre perception des modifications de la coagulation et de l’hémostase associées à la cirrhose [1, 2]. On est ainsi passé de l’idée d’une affection exposant à un risque majeur d’hémorragie par défaut de coagulation, à celle d’un état exposant à un risque accru de thrombose par excès de coagulation. Un des dangers accompagnant ce type de mouvement pendulaire des idées est de passer d’un excès à l’autre. Ce qui n’est pas sans conséquence puisque ce changement de conception conduit à envisager des traitements radicalement opposés : substitution, peut-être excessive, des déficits de coagulation dans la période antérieure ; anticoagulation, peut-être excessive, dans la période suivante.

Le but de cet exposé est de résumer l’état des connaissances et des ignorances sur le sujet, en envisageant successivement les anomalies de la coagulation au cours de la cirrhose ; les hémorragies et les thromboses associées à la cirrhose, puis plus spécifiquement, la thrombose des veines splanchniques ; et les traitements proposés pour la thrombose de la veine porte extra-hépatique. En terminant, les nombreux problèmes pratiques posés par le traitement anticoagulant au cours de la cirrhose seront abordés.

Anomalies de l’hémostase primaire et de la coagulation au cours de la cirrhose

Bien des difficultés rencontrées dans la compréhension de l’hémostase au cours de la cirrhose proviennent du caractère très insatisfaisant de nos moyens d’explorer in vitro un phénomène survenant in vivo dans un milieu sanguin mobile et en interaction constante avec les parois vasculaires. Les études in vitro les plus récentes ont donc été basées sur des tests tentant de mieux prendre en compte l’ensemble des processus survenant in vivo, et notamment ceux liés à l’endothélium et au flux sanguin. Malgré cela, il importe de rester assez prudent sur leur capacité à refléter les phénomènes d’hémostase et de coagulation prenant place in vivo.

Les taux circulants de la plupart des acteurs de l’hémostase primaire ou de la coagulation sanguine sont modifiés au cours de la cirrhose.

Hémostase primaire

Une thrombopénie (< 150 000 109/L) est très fréquente mais le plus souvent modérée [1-3]. La thrombopénie est d’ailleurs un excellent marqueur indirect du stade cirrhotique au cours de la plupart des maladies chronique du foie [4]. En revanche, une thrombopénie sévère (< 40 000 109/L) est très rare (environ 1 %) [5]. En fait, une thrombopénie sévère (< 40 000 109/L) ne semble pas plus fréquente au cours de la cirrhose qu’au cours des maladies chroniques du foie sans cirrhose [5]. Cela suggère que des mécanismes indépendants de la sévérité de la maladie du foie expliquent ces thrombopénies extrêmes. La thrombopénie est majorée au cours des périodes d’alcoolisation importante. Des anomalies fonctionnelles plaquettaires ont été décrites au cours de la cirrhose sans qu’un mécanisme très clair ait été mis en avant [3, 6]. Ces anomalies se manifestent par l’allongement du temps de saignement ou du temps d’occlusion en tube (PFA) [7]. Ces anomalies sont parfois corrigées par l’administration de vasopressine [8]. Leur pertinence clinique est incertaine [6, 9].

Le mécanisme de la thrombopénie au cours de la cirrhose est complexe et vraisemblablement multifactoriel [3, 10]. Les études cinétiques ont mis en évidence une augmentation de la captation splénique et une diminution de la durée de vie. Celle-ci s’explique en grande partie par un mécanisme immunologique de destruction des plaquettes. En effet, une augmentation importante des immunoglobulines fixées sur les plaquettes est habituelle au cours de la cirrhose. Ces mécanismes pourraient prendre place dans la rate hyperplasique elle-même. En fait, la splénomégalie de la cirrhose n’est pas ou peu congestive, contrairement à l’idée reçue. Elle n’est d’ailleurs que peu influencée par la réduction de la pression portale obtenue par une anastomose portosystémique. Il est fort possible que le passage dans la circulation systémique des antigènes d’origine intestinale – à la faveur des dérivations portosystémiques spontanées – joue un grand rôle dans la splénomégalie et la thrombopénie. Bien que la moelle osseuse ne soit pas pauvre en méga-caryocytes, il n’est pas exclu que la thrombopoïèse soit inappropriée. En effet, la concentration sérique de thrombopïétine semble être trop basse, du fait d’une production insuffisante de ce facteur de croissance par le foie cirrhotique. La correction rapide de la thrombopénie par la transplantation hépatique s’accompagne d’une forte augmentation des taux circulants de thrombopoïétine.

La relation entre plaquettes et hémorragie due à l’hypertension portale est difficile à analyser. Le risque d’hémorragie est clairement lié à la sévérité de la cirrhose (évaluée indépendamment du nombre de plaquettes par le score de Child-Pugh ou le MELD) [11]. Le taux de plaquettes est d’autant plus bas que la cirrhose est plus avancée. De plus, la présence et la taille des varices œsophagiennes est inversement liée au nombre de plaquettes circulantes [12]. Malgré cela, le risque d’hémorragie digestive ne semble pas lié à une anomalie de l’hémostase primaire. Les corrélations entre l’allongement du temps de saignement et le risque d’hémorragie n’ont jamais été clairement documentées au cours de la cirrhose [3, 6]. De même, lorsque sont pris en considération in vitro une part des conditions prévalant in vivo (et notamment le flux sanguin), le lien entre la thrombopénie et une perturbation de -l’hémostase primaire n’est mis en évidence que pour des niveaux de thrombopénie extrêmes (moins de 50 000 109/L) [13]. Ceci s’explique en partie par la très forte augmentation du facteur VIII et du facteur von Willebrand – notamment de haut poids moléculaire – observée au cours de la cirrhose, augmentation qui pourraient en quelque sorte compenser l’effet de la diminution des plaquettes circulantes.

Coagulation

Les taux de facteurs de coagulation circulants sont diminués au cours de la cirrhose à l’exception notable du facteur VIII, très augmenté [2]. La diminution du taux de Quick, qui en dépend largement, est d’ailleurs un indicateur très acceptable du stade cirrhotique au cours des maladies chroniques du foie [14]. Mais les puissants mécanismes d’inhibition de la coagulation, qui sont très dépendants de l’endothélium vasculaire, ne sont pas pris en compte par le taux de Quick. Or ces inhibiteurs de la coagulation sont au moins autant diminués que les facteurs de la coagulation au cours de la cirrhose. Lorsque la production de thrombine est évaluée in vitro dans des conditions qui se rapprochent plus de la situation in vivo, on ne met pas en évidence de diminution de la production de thrombine, l’évènement central de la coagulation sanguine. Parmi les protéines impliquées dans la coagulation sanguine, celle qui paraît la plus directement affectée par l’atteinte hépatique est la protéine C dont les taux sont diminués à moins de 50 % dès le stade A de Child-Pugh [1, 2]. La protéine S et l’antithrombine sont également diminuées d’une façon grossièrement parallèle à la sévérité de la cirrhose bien que cela soit moins net que pour la protéine C. Cette diminution disproportionnée de la protéine C par comparaison à la diminution des facteurs de coagulation pourrait même être responsable d’un état pro-coagulant [12, 13]. Cet état pro-coagulant ne peut être mis en évidence que par les tests in vitro permettant l’activation du système de la protéine C (impliquant protéine C et protéine S), par exemple par addition de thrombomoduline [7, 9].

L’interprétation des tests de fibrinolyse et de coagulation intravasculaire est délicate au cours de la cirrhose [15]. Certains patients ont une augmentation des taux de D-dimères, de complexes thrombine-antithrombine, de fibrinopeptide A et de fibrine soluble ; une diminution du temps de lyse ou des taux de fibrinogène [16]. Ces anomalies traduisent une amplification des phénomènes de coagulation intravasculaire et de fibrinolyse. Ils sont souvent associés à une infection [17]. Leur relation avec les risques d’hémorragie ou de thrombose n’est pas claire.

Hémorragie et thrombose au cours de la cirrhose

Une analyse plus précise des données épidémiologiques est venue étayer les conclusions des études de laboratoires récentes indiquant l’absence de perturbation majeure de l’hémostase primaire ou de la coagulation sanguine, voire même l’existence d’un état pro-coagulant.

Hémorragie

L’augmentation du risque d’hémorragie directement lié à la cirrhose n’a été clairement reliée qu’à l’hypertension portale, qu’il s’agisse des hémorragies spontanées (rupture de varice œsophagienne ou gastrique, gastropathie d’hypertension portale) ou provoquée par la chirurgie abdominale. Parallèlement, les traitements diminuant la pression portale ont clairement montré leur efficacité pour prévenir ou traiter ces saignements. Le saignement lié à l’hypertension portale peut être provoqué directement par l’augmentation de pression sanguine, ou indirectement par l’expansion considérable du système veineux splanchnique, expliquant sa blessure facile lors d’un grand nombre d’interventions (par exemple une paracentèse abdominale). Inversement, la relation avec la diminution des facteurs de coagulation paraît très indirecte. Le risque hémorragique est très clairement lié à la gravité de la cirrhose dont la baisse du taux de Quick est un des reflets. Cependant, comme indiqué plus haut cette diminution du taux Quick ne correspond pas à une diminution de la capacité à générer la thrombine. De plus, l’administration de facteurs de coagulation activés ne permet pas de diminuer la sévérité des hémorragies digestives y compris chez les malades ayant l’atteinte hépatique la plus grave [18]. De même, l’administration de desmopressine ne diminue pas la sévérité des hémorragies digestive alors qu’elle diminue souvent le temps de saignement [19].

Un autre mécanisme d’hémorragies beaucoup plus rares, spontanées ou provoquées par la ponction, est lié au caractère hypervascularisé (et à la nécrose ischémique) des carcinomes hépatocellulaires superficiels.

Il n’y a pas d’argument pour penser que le risque des saignements intra-crânien ou intracérébral, rétinien, articulaire, musculaire ou dans d’autres organes solides est augmenté au cours de la cirrhose indépendamment du risque accru de chute ou d’accident, et indépendamment des troubles de l’hémostase primaire induits par la prise d’alcool. Cela contraste avec la claire augmentation de ce risque chez les patients indemnes de cirrhose au cours des états d’hémophilie constitutionnelle ou acquise, par exemple du fait d’un traitement anticoagulant.

Thrombose

Plusieurs études épidémiologiques à grande échelle chez des patients hospitalisés sont venues documenter un risque modérément augmenté de thrombose veineuse profonde non splanchnique au cours de la cirrhose [1]. Quelques divergences sont toutefois apparues entre les études, probablement du fait de différences dans les populations témoin (maladie du foie sans cirrhose, population générale ou malades hospitalisés). L’augmentation de risque est faible, de l’ordre d’un facteur 2. Le principal message de ces études est effectivement que les sujets atteints de cirrhose ne sont pas protégés du risque de thrombose veineuse profonde. Lorsqu’ils sont hospitalisés, et donc alités ou victimes d’une affection néoplasique ou inflammatoire, le risque de thrombose veineuse doit être pris en considération, sans que la diminution des facteurs de coagulation puisse laisser penser qu’ils sont « naturellement anticoagulés ». Le traitement anticoagulant prophylactique ne semble pas accompagné d’un risque excessif d’hémorragie digestive ou de décès [20]. Le risque de thrombose splanchnique, spécifiquement augmenté, est discuté ci-dessous.

Thrombose des veines splanchniques au cours de la cirrhose

Diagnostic

La reconnaissance d’un risque élevé de thrombose des veines splanchniques chez les sujets atteints de cirrhose a attendu que des moyens diagnostiques non invasifs sensibles et spécifiques (échographie-Doppler, tomodensitométrie, IRM) soient devenus disponibles d’une part, et d’autre part que l’indication d’une évaluation répétée ait été justifiée par le dépistage du -carcinome hépatocellulaire ou la surveillance de la perméabilité vasculaire avant transplantation hépatique. Toutefois, du système porte et du système des veines hépatiques, seul le premier est réellement accessible à une exploration non invasive fine. En effet, la cirrhose elle-même entraîne parfois une telle distorsion des veines hépatiques qu’il est difficile de préciser ce qui revient à une thrombose ou à une déformation d’origine externe. D’autre part, une source de confusion considérable est générée par la dénomination erronée de « thrombose néoplasique » pour désigner l’invasion tumorale de la lumière veineuse par un carcinome hépatocellulaire. Le terme de thrombose néoplasique doit absolument être évité au profit de celui d’obstruction tumorale ou néoplasique. La distinction entre l’obstruction tumorale et la thrombose peut être difficile, ce d’autant qu’un thrombus peut se superposer à un bourgeon tumoral endovasculaire. La mise en évidence de l’artérialisation du matériel endoluminal (signaux Doppler de type artériel, ou rehaussement au temps artériel de l’injection d’un produit de contraste vasculaire) est le meilleur argument différentiel. On peut y ajouter la relation directe avec la tumeur ou l’élargissement marqué de la veine obstruée.

Prévalence et incidence

Les documents les plus précis sur les thromboses veineuses intrahépatiques ont été fournis par l’équipe d’Ian Wanless à l’examen de foies explantés [21]. Dans ces études, l’indication de la transplantation était une cirrhose avancée. Soixante-dix pour cent des veines hépatiques étaient le siège d’une obstruction par une fibrose intimale, suggérant une thrombose antérieure. Ce même type de lésion était observé au niveau de 40 % des veines du système porte intrahépatique. Point encore plus important, les territoires parenchymateux correspondant aux veines obstrués étaient le siège d’un remplacement des hépatocytes par des plages de tissu fibreux, dites « d’extinction parenchymateuse » interprétées comme secondaires aux obstructions veineuses.

L’analyse des études transversales aux plus grands effectifs de malades atteints de cirrhose fait apparaître une prévalence globale de la thrombose de la veine porte extra-hépatique de 10 à 15 % [22, 23]. Il est important de noter que, dans la grande majorité des cas, il s’agit d’une thrombose partielle (prévalence moyenne de 10 %) et beaucoup plus rarement d’une thrombose occluant complètement la lumière (prévalence moyenne de 3 %). Les rares études longitudinales disponibles montrent que dans près de la moitié des cas l’examen ultérieur montre une diminution de la taille du thrombus et une augmentation dans 15 % des cas [24, 25]. Fait important, l’évolution de la thrombose vers un cavernome semble très rare, à la différence de ce qui est observé dans la quasi-totalité des cas en l’absence de traitement chez les patients indemnes de cirrhose. Autrement dit, il est probable que, dans la majorité des cas, les cavernomes observés chez des patients avec cirrhose se sont développés indépendamment de cette dernière.

La prévalence observée a beaucoup varié en fonction des caractéristiques de la population étudiée et de la technique de détection. La prévalence était de moins de 1 %, dans une étude par portographie directe transhépatique chez des malades ayant une cirrhose peu sévère. La prévalence approche 25 % chez les malades en attente de transplantation hépatique, explorés avant une anastomose porto cave ou au cours d’un programme de sclérose de varices œsophagiennes [1].

On dispose de quelques données d’incidence dans des populations particulières. Chez des patients en attente de transplantation, une incidence de 7 % sur une durée de 7 à 8 mois a été observée [21]. L’incidence était de 12 % par an dans un groupe de patient inclus dans un programme d’éradication des varices œsophagiennes par méthode endoscopique [21].

Manifestations

Les manifestations cliniques de la thrombose de la veine porte extra-hépatique sont difficiles à cerner car il est impossible de distinguer manifestations proprement dites des circonstances de découverte. Il est clair que la thrombose peut être totalement asymptomatique. L’infarctus intestinal est toujours associé à une thrombose des veines mésentériques supérieure ou inférieure. Une hémorragie digestive paraît être une circonstance de découverte particulièrement fréquente [22, 23].

Causes

Les facteurs étiologiques possibles de la constitution de la thrombose de la veine porte extra-hépatique restent obscurs car il est très difficile de différencier, par les études transversales disponibles, ce qui est cause ou conséquence dans une association épidémiologique. Parmi les facteurs qui pourraient jouer un rôle causal, les données suggèrent (i) des éléments liés à sévérité de la maladie du foie qui pourraient être un état procoagulant discuté plus haut, ou une diminution de la vitesse circulatoire dans le tronc de la veine porte ou ses branches, et (ii) la coexistence fortuite ou non d’états prothrombotiques héréditaires, en particulier la mutation du gène de la prothrombine le facteur V Leiden et le polymorphisme C677T de la MTHFR [1]. Ces données doivent cependant être prises avec quelques réserves car les résultats convergents d’études indépendantes manquent et il n’y a pas eu d’évaluation longitudinale. Le rôle du déficit primitif en protéine C, protéine S ou antithrombine n’a pu être étudié en détail en raison de l’impact de la cirrhose elle-même sur les taux de ces inhibiteurs.

Conséquences

Pour les raisons symétriques aux précédentes, le rôle aggravant de la thrombose de la veine porte extra-hépatique sur la progression de la maladie du foie est difficile à préciser [1]. Un effet aggravant possible est suggéré par le fait bien établi que la ligature ou l’embolisation d’une branche de la veine porte induit une atrophie du territoire correspondant, aussi bien chez l’animal que chez l’homme, avec ou sans cirrhose [1]. Cependant, dans ces circonstances, l’atrophie est accompagnée d’une hypertrophie compensatrice des secteurs dont la perfusion portale a été préservée. Lorsque l’interruption du flux portal est totale -(ligature du tronc de la veine porte ou anastomose portosystémique), les conséquences hépatiques sont beaucoup moins claires. La présence d’une thrombose de la veine porte extra-hépatique a ainsi été associée à un volume hépatique plus petit, à une augmentation de la prévalence de l’encéphalopathie hépatique, de l’ascite, des hémorragies digestives et à une plus grande difficulté à contrôler les hémorragies digestives ou à une difficulté à éradiquer les varices œsophagiennes par ligature endoscopique [1, 26, 27]. Les études multivariées n’ont pas montré de rôle délétère propre de la thrombose de la veine porte sur la mortalité, une fois prise en compte la sévérité de la maladie du foie [24, 25, 28].

Dans l’ensemble, ces données ne permettent pas de faire la part entre 2 scenarii : (i) la thrombose de la veine porte, en diminuant la perfusion portale, induit une atrophie et aggrave l’insuffisance hépatique ; et (ii) la sévérité de la maladie du foie, reflétée par l’atrophie, augmente le bloc intrahépatique, ce qui précipite le développement de la thrombose de la veine porte. Un cercle vicieux associant les deux scenarii est également envisageable. Pour tenter d’y voir plus clair, nous avons analysé les données de l’étude CHC 2000 [29] au cours de laquelle 898 malades atteints de cirrhose de stade Child-Pugh A, initialement indemnes de carcinome hépatocellulaires, ont été suivis par échographie-Doppler répétées pendant 4 ans en moyenne [30]. Les analyses ont indiqué que le risque de survenue d’une thrombose de la veine porte extra-hépatique était lié à aux marqueurs initiaux de sévérité de la maladie (y compris dans ce groupe de maladies peu sévères), mais non à l’aggravation ultérieure, ni à la diminution de la vitesse circulatoire, ou à la coexistence de mutation du gène de la prothrombine ou du facteur V Leiden. À l’inverse, l’aggravation de la maladie du foie au cours du suivi était bien liée aux variables initiales décrivant la sévérité de la maladie mais aussi au fait de développer une thrombose de la veine porte. Toutefois, la survenue d’une thrombose de la veine porte n’était pas suivie d’une aggravation à brève échéance (dans les 6 mois). De plus, (i) dans la plupart des cas la thrombose était partielle ; et (ii) pour la majorité des malades chez qui une aggravation est survenue, celle-ci s’est produite en l’absence de toute thrombose de la veine porte. L’interprétation qui paraît la plus simple pour ces relations complexes est que la thrombose de la veine porte et l’aggravation de la maladie du foie sont bien liées, mais de façon indirecte par l’intermédiaire d’un facteur étiologique partagé. Il est tentant de faire d’une anomalie particulière de la microcirculation hépatique ou intestinale, ce facteur partagé conduisant à une progression plus rapide de la maladie du foie d’une part, et à une thrombose de la veine porte d’autre part. Cette hypothèse reste à prouver mais des données thérapeutiques récentes discutées plus loin viennent l’étayer.

Impact sur la transplantation hépatique

L’importance de maintenir une perfusion portale du foie greffé a été re-connue de très longue date. Dans ce contexte, les difficultés techniques posées par la thrombose préopératoire de la veine porte ont été rapidement identifiés. La sélection des malades, les progrès des techniques de recanalisation, la différentiation des obstructions partielles et complètes ont permis d’augmenter le nombre de malades transplantés malgré la thrombose de la veine porte. Toutefois, plusieurs études convergent pour faire de la présence préopératoire la veine porte un facteur de mortalité accrue après la greffe [28, 31]. De façon très intéressante, deux de ces études indiquent que l’impact pronostique de la thrombose porte préopératoire est délétère, principalement chez les malades ayant un score MELD bas, alors que le bénéfice de la greffe reste marqué pour les malades avec un score MELD élevé malgré la thrombose porte [28, 31]. Ces données suggèrent que chez un malade avec thrombose de la veine porte, suffisamment grave pour qu’une transplantation soit envisagée malgré un score MELD bas, un facteur de pronostic péjoratif indépendant de la maladie du foie est à l’œuvre et ne sera pas corrigé par la greffe. Un tel facteur pourrait être une maladie primitivement veineuse ou un état prothrombotique.

Traitement de la thrombose de la veine porte

Les données sur les traitements proposés pour la thrombose de la veine porte proviennent de 2 sources différentes : (i) les traitements pharmacologiques (anticoagulants ou thrombolytiques), principalement chez des malades en attente de greffe, avec pour objectif de faciliter cette dernière en obtenant une résolution de la veine, ou en limitant l’étendue et le degré de l’obstruction; et (ii) le shunt portosystémique intrahépatique par voie transjugulaire (TIPS), effectué pour des indications variées et mis en place chez certains malades ayant une thrombose de la veine porte.

Traitements pharmacologiques

Traitement anticoagulant

Les études publiées sont rétrospectives et non contrôlées. De ce fait, les informations sur la tolérance et l’efficacité sont limitées. Les principales séries, bien qu’incluant des malades consécutifs, sont l’objet de divers biais de sélection. Elles ont porté sur un total de moins de 200 patients [23, 32, 33]. Le degré (partiel ou complet) et l’extension de l’obstruction (aux racines et aux branches de la veine porte) n’ont pas été précisés. Les traitements ont compris des héparines de bas poids moléculaire seules ou des anticoagulants oraux.

L’information la plus claire est l’absence de décès dus à une hémorragie. Une résolution complète du thrombus a été observée pendant le traitement dans environ 40 % des cas, et une résolution partielle dans environ 15 % supplémentaires. Ces observations doivent être comparées aux données plus récentes sur la diminution de taille du thrombus dans 40 % des cas en l’absence de traitement anticoagulant. L’efficacité des anticoagulants est donc peut-être plus limitée que les observations non contrôlées globales ne le laissent supposer. Quelques éléments suggèrent malgré tout un effet réel du traitement : (i) la prolongation du traitement anticoagulant a permis d’obtenir une résolution complète chez la quasi-totalité des patients traités 12 mois [34] ; (ii) la suspension du traitement anticoagulant a été suivie de la récidive de la thrombose chez 25 % des patients [32]. Les études étaient trop limitées pour permettre de caractériser les facteurs associés à la résolution du thrombus. Le degré de l’obstruction (partielle ou complète) pourrait en être un élément déterminant.

L’utilité du traitement anticoagulant devrait être évaluée par son effet sur des critères cliniques comme les complications de la cirrhose ou la mortalité. En l’absence de groupe témoin, aucune des études actuellement rapportée n’a été en mesure de le faire. Comme discuté plus haut, la perméabilité de la veine porte n’est pas un critère de jugement indirect utilisable pour l’instant.

Toutefois, il faut mentionner ici les résultats très intéressants d’un essai thérapeutique contrôlé par tirage au sort évaluant la prévention de la thrombose de la veine porte par l’enoxaparine, 4 000 UI par jour pendant 48 semaines, chez des malades de gravité intermédiaire (Child-Pugh B7-C10) [35]. Ce traitement a permis de prévenir complètement la survenue d’une thrombose complète ou partielle (6 des 36 malades du groupe témoin, aucun des 34 malades du groupe traité, P = 0,001). Mais il a aussi permis de prévenir de façon encore plus évidente la décompensation (11,7 % vs 59,4 %, P < 0,0001) et de diminuer la mortalité (P = 0,02). Le bénéfice gagné pendant l’année de traitement a été maintenu pendant les 2 à 4 années de suivi ultérieur. Une fois encore, ces données mettent en évidence la dissociation entre l’aggravation de la cirrhose et la survenue d’une thrombose de la veine porte, mais aussi la dissociation entre le bénéfice du -traitement anticoagulant sur la progression de la maladie et la prévention de la thrombose de la veine porte extra-hépatique. Là encore, un effet du traitement sur un déterminant commun de la thrombose et de la progression expliquerait au mieux ces données apparemment paradoxales.

Les complications hémorragiques ont été analysées en détail dans peu de publications. Dans aucune des séries l’incidence des hémorragies dues à l’hypertension portale n’a semblé particulièrement élevée [23, 32, 33, 35, 36]. Des hémorragies non dues à l’hypertension portale ont été observées. Comme mentionné plus haut, aucune n’a été mortelle. Certaines hémorragies ont été provoquées par une intervention, notamment une paracentèse. Une étude a trouvé pour facteur de risque d’hémorragie non liée à l’hypertension portale une thrombopénie inférieure à 50 000 109/L, ce qui n’est pas surprenant [32].

Traitement thrombolytique

Les effets indésirables étaient minimes et la résolution de la thrombose de la veine porte était habituelle dans une petite série non contrôlée de malades recevant l’activateur tissulaire recombinant du plasminogène par voie intraveineuse périphérique et une héparine de bas poids moléculaire [37]. Des observations isolées ou de petites séries de cas sélectionnés ont rapporté des résultats favorables de la thrombolyse délivrée in situ par le moyen d’une ponction transveineuse intrahépatique transjugulaire de la veine porte. Ces résultats doivent faire l’objet d’une confirmation indépendante avant de pouvoir être pris en compte. En effet, en l’absence de cirrhose, la thrombolyse pharmacologique pour thrombose de la veine porte a été associée à des effets indésirables létaux [38]. Là encore, il faudra aussi prouver le bénéfice en termes de critères cliniques robustes.

Traitement par TIPS

Plusieurs séries de cas consécutifs de patients ayant une thrombose de la veine porte et recevant un TIPS ont été rapportées. Au total, environ 200 cas ont été inclus dans des études de taille suffisante [22, 39-41]. Dans la plupart des cas, le TIPS était indiqué par des complications (ascite ou hémorragie digestive) réfractaires au traitement médical ou endoscopique. Une première information importante est un taux de succès important, dépassant 85 %, voire 95 % dans la plupart des séries. Toutefois cette information doit être pondérée par le fait que l’information sur le degré et l’extension de l’obstruction portale ont rarement été précisés.

Logiquement, il apparaît que la visualisation des branches intrahépatiques de la veine porte est une condition du succès de la mise en place du TIPS. Lorsque le thrombus est partiel, la seule mise en place du TIPS permet la résolution du thrombus dans la majorité des cas en l’absence de traitement anticoagulant. Une explication plausible est que la seule restauration d’une vitesse circulatoire élevée permet de rétablir les mécanismes naturels de thrombolyse et d’anticoagulation.

La comparaison des malades traités par TIPS avec et sans thrombose de la veine porte n’a fait apparaître aucune différence d’évolution quant à l’incidence de l’encéphalopathie, le contrôle de l’ascite et des hémorragies digestives ou la mortalité. Ces données ne permettent pas de se faire une idée de l’éventuel bénéfice apporté par le TIPS aux malades avec thrombose de la veine porte, faute d’un groupe témoin non traité par TIPS.

Que recommander pour le traitement de la thrombose de la veine porte ?

Deux situations ont été le sujet de publications permettant d’élaborer quelques recommandations.

(i) Des complications réfractaires au traitement médical justifient la discussion d’un TIPS alors qu’il y a une thrombose de la veine porte. Dans ce cas, sous réserve que des veines porte intrahépatiques soient visibles, un TIPS pourra probablement être mis en place, permettre la résolution du thrombus et contrôler les complications bien qu’il augmente la probabilité d’une encéphalopathie hépatique et ne diminue pas la mortalité globale. La thrombose de la veine porte n’est pas une contre-indication au TIPS.

(ii) Le patient est clairement candidat à une transplantation hépatique dans un proche avenir ou à moyen terme car il n’y a pas de moyen de freiner l’évolution de la maladie chronique du foie. Même en l’absence de manifestations cliniques, une thrombose de la veine porte est documentée. Une prophylaxie adéquate des hémorragies digestives de l’hypertension portale a été instaurée. Un traitement anticoagulant peut alors être proposé pour éviter l’extension de la thrombose de la veine porte, voire pour obtenir sa résolution afin de faciliter la greffe et peut-être d’améliorer la survie après la greffe. Dans cette situation également, le bénéfice du traitement anticoagulant reste plausible mais hypothétique. Le plus grand soin doit être apporté dans la discussion des éventuelles contre-indications au traitement anticoagulant.

D’autres situations, beaucoup plus rares, peuvent également faire envisager un traitement anticoagulant mais il n’y a pas encore de données solides pour l’étayer, faute d’études appropriées. (iii) Une thrombose de la veine porte a été documentée et l’enquête a mis en évidence un état prothrombotique fort, tel un syndrome myéloprolifératif ou un syndrome des anti-phospholipides, un état homozygote ou hétérozygote composite pour les mutations du gène de la prothrombine ou du facteur V Leiden.

(iv) Une thrombose de la veine mésentérique supérieure ou inférieure et des signes d’ischémie intestinale étaient présents. Dans ce dernier cas, le but est de prévenir la récidive d’une atteinte ischémique intestinale sous une forme grave.

Dans toutes les autres situations, rien n’indique un possible bénéfice du traitement anticoagulant alors que le risque de complications hémorragiques potentiellement mortelles n’a aucune raison d’être inférieur à ce qu’il est chez les sujets non cirrhotiques (au moins 1 % de mortalité). L’abstention est alors recommandée.

Autres indications du traitement anticoagulant

Chez le malade atteint de cirrhose, un traitement anticoagulant peut être indiqué pour d’autres raisons qu’une thrombose de la veine porte extra-hépatique, en particulier une fibrillation auriculaire, une thrombose -veineuse profonde, ou une embolie pulmonaire. Comme il a été discuté plus haut, il serait erroné de penser que la diminution des facteurs de coagulation représente une anticoagulation naturelle. Le peu de données dont on dispose suggère que le risque hémorragique soit peu ou pas augmenté par rapport à ce qu’il serait chez des malades indemnes de cirrhose, sous réserve qu’une prophylaxie adéquate des hémorragies de l’hypertension portale ait été instaurée [20, 42].

La question du traitement préventif des thromboses veineuses profondes chez les malades atteints de cirrhose et hospitalisés est posée. Les données montrant qu’un certain degré d’hypercoagulabilité est probablement présent chez ces patients (comme discuté au début de cet exposé) et l’absence d’excès évident de risque de saignement justifient que les règles de prophylaxie habituelles soient aussi appliquées aux malades atteints de cirrhose [42].

Une exception à ces recommandations pourrait être représentée par les malades ayant une thrombopénie sévère (< 50 000 109/L), surtout des saignements spontanés, muqueux ou cutanés sont visibles.

Problèmes pratiques

La mise en œuvre d’un traitement anticoagulant est plus aisée à prendre en principe qu’à mettre en œuvre en pratique.

Comment surveiller ?

Anticoagulants oraux

L’étape centrale de la détermination du taux de Quick (« TP ») est le déclenchement de la réaction de coagulation in vitro par adjonction d’un mélange de phospholipides anioniques et de facteur tissulaire, nommé « thromboplastine ». Des résultats très différents peuvent être obtenus avec des thromboplastines d’origines différentes. La détermination de l’International Normalized Ratio (INR) permet de standardiser la mesure du taux de Quick quelle que soit la thromboplastine. Cela suppose un étalonnage de la thromboplastine, étape faite avec le plasma de malades sous antagonistes de la vitamine K. Malheureusement, cet étalonnage n’est pas adapté aux diminutions de facteurs de la coagulation déterminés non par les antagonistes de la vitamine K mais par les maladies du foie [2, 36, 43]. Au bout du compte, l’évaluation du taux de Quick spontané au moyen de l’INR donne des résultats moins fiables que l’évaluation du taux de Quick en pourcentage des valeurs normales. Le problème est évidemment amplifié lorsqu’il s’agit de surveiller le traitement par antagonistes de la vitamine K chez des malades atteints de cirrhose [36]. Il n’y a pas de bonne solution à ce problème. Peut-être l’utilisation du taux de la prothrombine (facteur II) est-elle la moins mauvaise, la valeur à obtenir étant comprise entre 25 et 35 % ?

Héparines

Hors situations particulières (insuffisance rénale ou grossesse), il n’y a pas lieu de surveiller par des tests in vitro le niveau d’anticoagulation obtenu par les héparines de bas poids moléculaire, données à dose adaptée au poids corporel. Si la mesure de l’activité anti-X activé (anti-Xa) était effectuée, on devrait tenir compte de la baisse de l’antithrombine due à la maladie du foie [42]. Les héparines agissent en effet comme cofacteur de l’antithrombine dont ils amplifient considérablement l’activité inhibitrice. Au cours des maladies du foie, ces tests ne sont donc pas interprétables [36]. La surveillance des plaquettes pour dépister une thrombopénie induite par l’héparine est tout aussi nécessaire au cours de la cirrhose [20]. Elle peut être rendue plus délicate par la diminution initiale des plaquettes.

Quel anticoagulant ?

Aucune comparaison n’ayant été faite entre héparines et antagonistes de la vitamine K au cours de la cirrhose, le choix ne peut être basé sur des arguments solides [44]. Les difficultés de la surveillance et la plus longue durée d’action des antagonistes de la vitamine K sont à prendre en compte. La possible meilleure acceptabilité du traitement oral également. La seule étude prospective disponible a utilisé l’enoxarine à la dose de 4 000 UI par jour. Les complications hémorragiques y étaient très rares et l’efficacité clinique manifeste pour la prophylaxie des complications de la cirrhose. Cette modalité d’anticoagulation mériterait donc d’être retenue pour l’instant. Pour tentants qu’ils soient, il n’y a pas de place hors essai thérapeutique pour les nouveaux anticoagulants oraux. En effet, leur métabolisme est fortement modifié par l’atteinte hépatique et ou rénale ; les bénéfices par rapport aux autres anticoagulants pour la prévention des thromboses et des hémorragies n’est pas toujours évident, et on ne dispose pas d’antidote [44].

Quelle durée ?

Celle-ci varie probablement en fonction de l’objectif du traitement. Pour l’instant, le principal objectif, quelle qu’en soit l’indication, est la prévention de l’extension d’une thrombose constituée. Le traitement ne devrait donc être interrompu que si les facteurs étiologiques de la thrombose ont été corrigés. Dans le contexte de nos connaissances limitées de la thrombose de la veine porte au cours de la cirrhose, cette correction n’est probablement obtenue qu’avec la transplantation. La greffe pourrait donc représenter le terme de l’anticoagulation.

Lorsque le but est la prévention de la thrombose veineuse profonde du patient alité, il est logique d’interrompre la prophylaxie dans les délais recommandés pour les patients indemnes de cirrhose.

Que faire en cas de gestes invasifs ?

Lorsque les arguments qui poussent à administrer un traitement anticoagulant chez les malades atteints de cirrhose sont faibles (comme dans le cas de la thrombose de la veine porte), la règle doit être d’en minimiser les effets indésirables et donc de les interrompre lorsqu’un geste invasif est envisagé.

Dans certaines circonstances, le traitement ne peut être interrompu, notamment quand il s’agit d’un patient atteint de tachyarythmie par fibrillation auriculaire, ou porteur d’une valve cardiaque mécanique. Certains gestes, comme les ligatures endoscopiques, sont nécessaires pour le contrôle de la maladie du foie. Des données préliminaires suggèrent l’absence de supplément majeur de risque à effectuer les ligatures sans interrompre le traitement. D’autres procédures, comme la biopsie hépatique, peuvent être effectuées par voie transveineuse sans interrompre l’anticoagulation. Dans tous les autres cas, l’indication de la procédure invasive doit être soigneusement pesée.

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Les Cinq points forts

Au cours de la cirrhose :

  1. La diminution des plaquettes (si elles restent > 50 000 109/L) et du taux de Quick ne se traduit habituellement pas par un trouble de l’hémostase ou de la coagulation ; ces anomalies sont compensées par des anomalies de direction inverse (augmentation du facteur VIII et du facteur von Willebrand et  diminution des inhibiteurs de la coagulation).

  2. Le risque de thrombose veineuse profonde n’est pas diminué ; il pourrait même être modérément augmenté ; le risque de thrombose de la veine porte est très élevé.

  3. L’impact de la thrombose de la veine porte sur la progression de la maladie du foie, comme le bénéfice de la résolution de la thrombose de la veine porte, ne sont pas prouvés.

  4. Les indications des anticoagulants sont limitées à ce jour aux patients atteints de thrombose de la veine porte et :

    • candidats à une greffe de foie, OU

    • atteints d’un état prothrombotique fort, OU

    • ayant une atteinte étendue de la veine mésentérique supérieure.

  5. Le bénéfice du traitement anticoagulant à dose prophylactique paraît beaucoup plus marqué pour les complications de la cirrhose que pour la prévention de la thrombose de la veine porte ; un effet sur la microcirculation intrahépatique pourrait l’expliquer ; ces données sont encore trop limitées pour baser  des recommandations de pratique clinique pour l’instant.