[Atelier] La sédation en endoscopie

Objectifs pédagogiques

  • Connaître les nouveaux outils de sédation
  • Par qui et comment ?

La sédation en endoscopie digestive rentre dans le cadre de la prise en charge des patients en ambulatoire. Trois aspects de cette prise en charge seront évoqués au cours de cet atelier.

Contexte ambulatoire

S’agissant pour l’instant d’une prise en charge anesthésique, tout patient devant bénéficier d’une sédation pour endoscopie doit avoir une consultation anesthésique réalisée plusieurs jours avant l’acte. La consultation du gastroentérologue avant le geste prévu est bien entendu aussi fortement recommandée. La consultation anesthésique peut être délocalisée, c’est-à-dire qu’elle peut être réalisée par un médecin anesthésiste travaillant dans un autre établissement. Cet aspect particulier de la prise en charge a fait l’objet d’une recommandation du Comité « Vie Professionnelle » de la SFAR [1]. Schématiquement, l’équipe d’anesthésie qui prendra en charge le patient pour l’intervention doit être informée de cette procédure et doit avoir donné son accord. Le médecin sollicité pour cette consultation est libre de la refuser. Ainsi, il semble utile d’intégrer cette procédure dans un réseau de soins ou au moins prévoir une contractualisation entre deux établissements. Concernant les actes itératifs, un délai maximal d’un mois semble raisonnable entre deux consultations en dehors de modifications importantes de l’état de santé du patient (un bref entretien téléphonique suffit) et si l’acte prévu a un retentissement physiopathologique peu important.

La prise en charge des patients en hospitalisation ambulatoire a fait l’objet de recommandations formalisées d’experts en 2009 [2]. Les patients de classe ASA1 à 3 peuvent bénéficier d’une prise en charge ambulatoire. Il est recommandé que les patients sédatés ne doivent pas conduire de véhicule pendant au moins 24 heures, nécessitant d’être accompagné par un tiers lors du retour à domicile. Les règles de jeûne n’ont pas été revues, mais un délai de 3 heures entre la prise de boisson (solution de préparation de la coloscopie comprise) et le début de l’anesthésie est suffisant pour assurer une vacuité gastrique satisfaisante. Il n’est pas nécessaire d’attendre la reprise d’une alimentation liquide ou solide pour que le patient puisse quitter l’établissement de soins.

Les relations entre l’équipe anesthésique (médecin et infirmière) et l’équipe d’endoscopistes

Si, aujourd’hui, le rôle de chacun pendant la période opératoire est bien codifié, deux aspects préopératoires « frontière » doivent être discutés : la gestion des médicaments anticoagulants et/ou antiagrégants plaquettaires et la prescription de l’antibioprophylaxie. Ce traitement a fait l’objet de deux recommandations, l’une de la SFAR en 1999 [3] et l’autre de la SFED en 2004 [4]. En résumé, deux situations se présentent : le patient présentant un risque cardiaque (pathologies valvulaires) doit systématiquement bénéficier d’une prophylaxie antioslérienne (amoxicilline 2 grammes IV et gentamicine 1,5mg/kg IV une heure avant le geste, puis 6 heures après amoxicilline 1 gramme per os), quel que soit le geste endoscopique. En l’absence de pathologie cardiaque, une antibioprophylaxie devra être prescrite lors d’une endoscopie des voies biliaires avec obstacle, de scléroses de varices oesophagiennes, de ligatures de varices en période hémorragique et enfin de la gastrostomie endoscopique [3]. Des divergences existant entre les recommandations [3, 4], il semble important de rédiger dans chaque centre un protocole commun (anesthésistes et gastroentérologues). Peu importe qui prescrit, ce qui compte c’est que le patient reçoive l’antibiotique, s’il est indiqué, à la bonne dose et au bon moment.

La gestion des médicaments anticoagulants et antiagrégants a également fait l’objet de recommandations conjointes de la SFAR et de la SFED [5]. La décision de poursuivre ou d’arrêter un tel traitement dépend de trois critères : 1) la procédure endoscopique comporte-t-elle un risque hémorragique (ce risque est réparti en trois grades : 1) faible, 2) élevé et 3) faible mais sans possibilité de contrôle endoscopique) ; 2) le risque hémorragique inhérent aux médicaments et 3) le risque thromboembolique existant lors de l’arrêt du traitement. Les combinaisons de ces trois critères étant nombreuses, une attitude concertée entre l’anesthésiste et le gastroentérologue doit être mise en place, précisant par exemple quel est le praticien en charge de l’application de la procédure. La mise au point de « fiches navettes » permettant de faire circuler ces informations, y compris l’antibioprophylaxie éventuelle, pourrait être intéressante. Le plus souvent, du fait même de la consultation anesthésique obligatoire, le médecin anesthésiste applique ces recommandations, mais il ne faut pas oublier que la poursuite d’un tel traitement n’interfère pas avec la conduite de l’anesthésie proprement dite.

La sédation : jusqu’où et avec quoi ?

Pour la plupart des actes d’endoscopie de routine (gastroscopie, colonoscopie), une profondeur de sédation modérée suffit. La profondeur de la sédation peut être classée en quatre stades allant de la sédation légère à l’anesthésie générale [6]. Le glissement de la sédation légère vers l’anesthésie générale peut être brutal et non détecté en l’absence d’un monitorage clinique et instrumental. Lemonitorage clinique se base sur des échelles de sédation dont la plus usitée dans ce contexte est la grille MOAA/S définissant 6 niveaux de sédation : stade 5 : réponse normale à la stimulation vocale, jusqu’à 0 absence de réponse à une stimulation nociceptive définissant l’anesthésie générale. Le degré de sédation compatible avec un acte d’endoscopie de routine correspond aux stades 5-3 de la grille MOAA/S.

Le monitorage instrumental a pour objectif de détecter le plus rapidement possible la survenue d’une complication cardiovasculaire et/ou respiratoire liée soit à l’acte endoscopique (une inhalation par exemple), soit à l’effet des médicaments de la sédation (midazolam ou propofol le plus souvent). Ce monitorage doit permet de mesurer au minimum la fréquence cardiaque, la pression artérielle non invasive automatiquement, la saturation artérielle en oxygène et la fréquence respiratoire grâce à la capnographie. Dans certains cas, comme l’insufflation de CO2 pour certaines techniques endoscopiques, les valeurs des constantes peuvent être modifiées. Si un monitorage est indispensable, il ne jouera son rôle d’alerte qu’à la condition qu’il existe dans la salle d’examen du personnel dédié à cette activité et formé à l’analyse des informations transmises par les moniteurs.

Certaines méthodes de sédationanalgésie, telles que l’inhalation d’un mélange équimolaire d’oxygène et de protoxyde d’azote (MEOPA), la relaxation ou l’hypnose peuvent être réalisées avec un environnement et une surveillance moindre.

Aujourd’hui, la conduite de la sédation et/ou de l’anesthésie est sous le contrôle de l’équipe anesthésique. À terme, la conduite de la sédation et non de l’anesthésie pourra être confiée à l’équipe d’endoscopie à la condition qu’elle soit formée au maniement des agents pharmacologiques et à la surveillance clinique et instrumentale de la sédation. Il faut souligner que le personnel impliqué dans la sédation ne pourra participer directement à l’acte d’endoscopie. Ces différents aspects font l’objet d’une réflexion commune SFAR, SFED avec le soutien de l’HAS sous la forme de recommandations formalisées d’experts (RFE).

Références

  1. Les consultations préanesthésiques délocalisées et consultations préanesthésiques pour anesthésies itératives et rapprochées. http://www.sfar.org/ consultdeloc_iteratives.html
  2. Recommandations formalisées d’experts : prise en charge anesthésique des patients en hospitalisation ambulatoire. http://www.sfar.org
  3. Recommandations pour la pratique de l’antibioprophylaxie en chirurgie ? Actualisation 1999. http://www.sfar. àrg:consensusantibio.html
  4. Recommandations de la SFED. Antibioprophylaxie et endoscopie digestive ; janvier 2004.
  5. La prise en charge des patients sous anticoagulant ou sous agents antiplaquettaires avant une endoscopie digestive. SFED.
  6. Practice guidelines for sedation and analgesia by non-anesthesiologists. An update report by the American Society of Anesthesiologists task force on sedation and analgesia by non-anesthesiologists. Anesthesiology 2202;96: 1004-17.

Les 5 points forts

  • Un patient peut bénéficier d’une consultation préopératoire dans un établissement autre que celui où sera réalisé l’acte. L’existence d’un réseau de soins ou d’un accord professionnel améliore la performance de l’organisation.
  • La prise de PEG avant une coloscopie doit être interrompue 3 heures avant le début de la sédation.
  • La prescription de l’antibioprophylaxie ainsi que la gestion des traitements anticoagulants et antiagrégants plaquettaires doivent faire l’objet d’un accord entre les équipes d’anesthésie et d’endoscopie précisant le rôle et la responsabilité de chacun.
  • Toute sédation doit bénéficier d’une surveillance clinique (grille MOAA/S) et instrumentale (fréquence cardiaque et respiratoire, pression artérielle non invasive automatique, saturation artérielle en oxygène).
  • Des recommandations formalisées d’experts sont en cours de rédaction afin de préciser le cadre dans lequel les équipes d’endoscopie pourront assurer elles-mêmes la sédation.